Autisme / Neurodiversité · décembre 7, 2018

Le non-autisme de Joseph Facal (et certains autres)

Le non-autisme de Joseph Facal (et certains autres)


«Tu écoutes les nouvelles qui parlent de toi.
Une émotion étrange te parcourt. On parle de toi. Ton cœur s’agite. Non, ce n’est pas que tu es célèbre, et l’émotion te blesse.
On parle de toi sans te connaitre.
Tu écoutes quand même. Tu dis non. Tu dis que c’est faux. Tu es toute seule. Personne ne t’écoute.
Tu écoutes, tu cries dans ta tête. Pour rien. Impuissante, tu veux pleurer. On parle de toi. Tu pleures.
Les gens s’insultent en ton nom. Être comme toi serait une insulte.
On te dit malade, déficiente, indésirable, à peine humaine, on veut te réparer.»
Extrait d’Aimer dans l’imbroglio, 2018

Ainsi, Joseph Facal récidive. Si je me rappelle bien, en octobre 2017, il avait utilisé le mot autisme de façon inadéquate. Il revient en 2018 : «il y a peu de domaines où les résultats de la recherche sont aussi éloignés de cet omniprésent discours jovialiste, autistique et moralisateur.»

Est-ce qu’il croit que le discours autistique n’est pas valable?

Est-ce que ses connaissances sur les autistes sont si dépassées qu’il présume que nous sommes déconnectés de la réalité?1

Je lui ai posé la question hier. Sur Twitter et par courriel. Mais j’ai finalement compris qu’il ne me répondra pas.

Personnellement, il me semble logique. Une personne qui méprise les paroles des autistes, elle va ignorer, très probablement, ce qu’un autiste dit, simplement.

Joseph Facal n’est pas le seul. Certains journalistes, politiciens et autres trouvent qu’il est bien de s’insulter en se traitant d’autiste. Ce n’est pas tous mais c’est un fait qui revient de temps en temps.

Nous sommes tous ignorants de quelque chose. Il n’y a pas de mal à se tromper. Moi même, quand je ne savais pas que je suis autiste, je croyais aussi qu’un autiste ne parle pas du tout. Je n’ai pas honte. À l’époque, on parlait très peu sur nous. J’ai reconnu mon erreur.

Ce qui est lamentable est l’attitude prétentieuse : «moi, je sais puis toi, l’autiste, tu ne me donneras pas des leçons». D’ignorer si l’autre conteste. 

C’est triste.

Surtout, c’est grave.

J’explique. C’est justement à cause de cette vision, héritée d’une culture de normalisation; celle qui colle une étiquette de «déficient» sur la divergence par rapport à une norme; que les personnes autistes ont subi des horreurs au cours de l’histoire. Cette vision est à l’origine de l’exclusion et la discrimination parce qu’elle dicte «un autiste, n’est pas capable, il est dans sa bulle loin de la réalité». Pourtant c’est faux et offensif pour toute la communauté.

Et qui sait? C’est peut-être la raison pour laquelle la participation social des autistes est pauvre. Ce n’est pas fréquent de faire appel aux autistes quand il s’agit de concevoir un dossier, un événement ou un projet concernant l’autisme. Combien de personnes pensent qu’un autiste n’est pas apte, pour aller à l’école, à l’université ou travailler?

Mon texte ne vise pas une personne. Mon titre n’est absolument pas une insulte. Il veut rappeler qu’il faut vivre la détresse pour être sensible à une cause. Monsieur est non autiste, apparemment, donc il ne connait pas probablement notre histoire ni nos batailles. Je ne suis pas en colère. Je suis inquiète. Prenez mes paroles comme une opposition à l’ancienne croyance qui nous blesse et que nous essayons d’effacer.

Dans la communauté de l’autisme, il y a heureusement une écoute. Pourtant, dehors, on constate qu’il y a peu d’évolution positive. Je vous propose de réfléchir et de m’aider à transmettre ce message aux personnes qui ont encore des préjugés contre nous.

Du fond de mon cœur.

Pour notre reconnaissance positive.

1 Jacques HochmannHistoire de l’autisme : de l’enfant sauvage aux troubles envahissants du développement, Paris, Odile Jacob, 2009

À lire:

RACONTER L’AUTISME AUTREMENT
https://autcreatifs.com/2014/12/19/raconter-lautisme-autrement/

Recommandations pour la terminologie de l’autisme dans les médias

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